lundi 20 mai 2013

Clôture de 4 mois de trottinage en Asie

14 décembre 2012 : Fin du trottinage après 4 mois de vadrouille entre Bombai et Bangkok...


Derniers mots échanges en thaï......derniers sourires, dernières effluves tropicales dans nos naseaux, dernier frisson de chaleur.
Derniers regards désolés vers des touristes torses-nus bière à la main... et qui ont, à notre grand désespoir, la même couleur de peau que nous ! Appartenons-nous au même monde ? Pourtant leurs comportements nous apparaissent finalement bien plus étrangers que celui des Thaïlandais.

On traine nos semelles dans Bangkok, tristes de quitter ce beau pays ce soir et déroulant mentalement les souvenirs de ces 4 mois écoulés à trottiner. 


Arrivés au bout de ce périple, nos réflexions et les idées qui se bousculent dans nos têtes me rappelle un chouette ouvrage de Michel Onfray qui formule à la perfection ce que nous ressentons : la "Théorie du Voyage" dont on s'est inspiré pour écrire ce post.  






Nous avons rencontré des voyageurs de tous poils ayant chacun leur rythme, leurs motivations...

On a un petit pincement au cœur pour les voyageurs qui ont raté leur RDV avec l'Inde ou la Thaïlande qu'ils n'ont pas aimé, mais aussi pour ceux qui associent la terre des Thaïs au tourisme, à la prostitution ou à la drogue.

En réalité, on trouve LA Thaïlande qu'on a envie de trouver : de la prostitution à la spiritualité, du ghetto tourisme à l'authenticité, du sourire commercial au sourire du coeur. 
Le contact y est culturellement sur la retenue contrairement aux indiens faisant intrusion si facilement dans votre vie. Comme partout dans le monde, s'essayer à la langue locale est une vraie clé pour "provoquer" le contact et dessiner des sourires sur les visages.


La Thaïlande et l'Inde sont bien loin de l'idée que l'on s'en fait. Certes, les clichés illustrent une vérité mais ne sont souvent qu'un aspect d'une réalité plus large. 

On regrette que certains voyages ne consistent qu'à partir vérifier par soi-même combien le pays visités correspond bien à l'idée qu'on s'en fait, aux clichés annoncés dans des brochures publicitaires. 
Cela fait naître des aberrations comme les tribus des montagne contraintes de porter leurs vêtements traditionnels pour se montrer aux touristes. Certains en arriverait à souhaiter que les autochtones ne se développent pas et restent prisonniers d'un zoo humain pour satisfaire leur désir de folklore et seraient fort déçus de ne pas trouver sur place les lieux incarnés avec lequel ils avaient remplis leurs esprit.
"Le voyage suppose l'oubli de ce qu'on a lu, appris, entendu. Voyager appelle une ouverture passive et généreuse à des émotions générées par un lieu à prendre dans sa brutalité primitive, comme une offrande [...]".

Nous avons aussi rencontré des voyageurs qui cherchent ailleurs ce qu'ils ont... chez eux. Ayant les mêmes exigences de confort ou les mêmes habitudes culinaires, ils se voie,t proposer des toilettes occidentales dans le désert, une pizza dans les contreforts himalayens, la climatisation et la télé dans un bungalow les pieds dans l'eau, une piscine à débordements aux abor d'un village sans eau courante. Alors on se le demande : à quoi beau aller à l'autre bout du monde si c'est être pour être comme chez soi ? 

D'autres voyageurs encore jugent et ne peuvent s'empêcher de comparer avec leur propre culture. 
Pourtant, "il n'existe pas de vérité absolue mais plutôt des vérités relatives, pas de mètre étalon idéologique pour mesurer les autres civilisations, pas d'instruments comparatifs qui imposent la lecture d'un lieu avec les repères d'un autre, mais la volonté de se laisser remplir par le liquide local, à la manière des vases communicants."

Pourquoi appréhender une civilisation ou une culture avec les repères préfabriqués et enclos dans les limites du temps, d'une époque et de ses travers ? Cela consiste à se comporter comme un militant de son propre enracinement et à rester à la porte d'une civilisation, à effleurer une culture.
"Pourquoi ne pas tenter d'entrer dans un monde inconnu, sans prévenance, en spectateur désengagé, soucieux ni de rire ni de pleurer, ni de juger ni de condamner, ni d'absoudre ni de lancer des anathèmes, mais désireux de saisir de l'intérieur, de comprendre – selon l'étymologie." 
On ne peut nier que tout au long de notre périple de Mumbai jusqu'à Bangkok en 4 mois de trottinage, nous avons été témoin des ravages du tourisme, parfois synonyme de développement, souvent synonyme de défiguration des lieux et d'aliénation. Et malheureusement, cette idée qui nous tiraille : nous en sommes acteurs d'une manière ou d'une autre !

Mais on remarque aussi que, même soumis à la globalisation, subissant le tourisme de masse, embrassant le capitalisme à pleine bouche, même tous en jeans, un indien, un thaïlandais et un francais seront toujours différents de par les principes qui régissent leur vie, leurs croyances, leur organisation sociale, leur conception de la vie, de l'amour et de la mort...

Et heureusement car n'est-ce pas ce qui nous nourri en voyage en nous ouvrant des horizons, en dissipant le voile d'illusion de vérité absolue dans lequel risque de nous enfermer notre culture, en malmenant notre conditionnement quant aux notions du bien et du mal, du beau et du laid, du bienseillant ou du grossier, qui ne sont que des interprétations, des valeurs mouvantes ? TOUT N'EST QUE QUESTION DE RÉFÉRENTIEL.

Et souvent, malgré tout ce qui nous sépare, dans un instant de grâce, on rie et on s'émeut des mêmes choses, traversés par des émotions similaires.


Enfin, c'est finalement assez étrange de constater que le voyage est à la fois un désir d'altérité, de reconnaissance de l'autre dans sa culture, mais également de la reconnaissance de soi-même. Car, le premier voyageur rencontré, n'est-ce pas soi ? 

J'ai souvent eu l'impression que hors de mon domicile, loin de mes repères, de mes amis, de ma famille, dans l'exercice périlleux du nomadisme solitaire sans interférence d'autrui, le premier voyageur rencontré, c'était moi ! Que reste-t-il de mon identité dès la suppression des attaches sociales, communautaire, tribal, quand je me redécouvre seul, ou presque, dans un environnement différent ? J'ai à nouveau eu cette impression de découvrir ce dont j'étais porteuse. 
"On peut voyager seul, mais avec la certitude d'être sans cesse face à soi-même, dans le détail, nuit et jour, les heures fastes et néfastes. On doit se supporter, accepter sa propre compagnie [...]. Ce que l'âme embarque au départ se retrouve à l'arrivée, décuplé".
"C'est ainsi qu'il arrive là où il devait arriver et que le voyage se révèle... initiatique.  Loin d'être une thérapie, le voyage définit une ontologie, une art de l'être, une poétique de soi."
"Même si on se met en route mu par le désir de voir autre chose, par la rencontre de l'autre, d'une culture, d'un pays, on "risque" de partir à sa propre rencontre, de se retrouver, sinon de se trouver. "Soi, voilà la grande affaire du voyage. Le tour de la planète ne suffit pas toujours pour obtenir ce face-à-face. Une existence non plus, parfois."
"On croit qu'on part faire un voyage et c'est le voyage qui vous fait et vous défait." célèbre citation de Nicolas Bouvier.

Je réalise que je ne pourrais pas voyager en groupe. Cela me semble inconciliable avec le voyage. 
"Si la solitude contraint effectivement à la certitude de vivre en permanence avec soi-même, le groupe, lui, empêche de ne jamais jouir de soi."
A deux, entre amis ou en couple, c'est partager mais c'est aussi s'auto-suffire : on a moins besoin d'aller vers les autres, de développer un 6eme sens. Être deux c'est être un noyau dur, une première entité de partage qui se jette dans le monde. On valide les choix ensemble, on s'influencent mutuellement. Cela a quelque chose de rassurant. 

Etre deux introduit aussi évidemment une richesse supplémentaire dans le voyage : celle de l'autre !
On en est jamais au même stade, chacun a son rythme, ses peurs, ses joies, ses découragements, ses envies, ses bagages. 
On révèle également en voyage des facettes de soi dans ce nouvel environnement, le peureux peut devenir téméraire, l'extraverti devenir timide... 
La force de l'un compense la faiblesse de l'autre, la fatigue du premier appel la résistance du second. Et les rôles muent perpétuellement, l'un prenant le relai de l'autre puis inversement entrainés par une roue perpétuelle. 

Chargé de tous nos souvenirs au sens propre et figuré, nous embarquons pour Paris... 

Quittant la chaleur tropicale, nous arrivons dans un froid glacière lorsque nous débarquons en escale à Pékin dans une tempête de neige !

Dernier tronçon pour arriver à Paris... retrouver nos proches et notre bulle à nous. 




Bises à tous, bravo si vous avez tout lu, pour nous ce fût un plaisir de vous raconter ce qu'on a touché du doigt. Nous ne vous souhaite qu'une chose : Aller voir par vous-même ! 
Notre dernier post pour clôturer le blog sera un album photo. 


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